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Associations hEtErospEcifiqUES

L'incroyable biodiversité des zones récifales a multiplié les interactions et les évolutions des animaux le peuplant. Dans ces circonstances exceptionnelles, à coté des composantes classiques du réseau trophique liant les producteurs, consommateurs et décomposeurs dans des relations prédateurs-proies ou de concurrences ce sont aussi développées des liens de coopérations durables entre espèces (liens hétérospécifiques). Ces associations se font à des niveaux physiologiques ou comportementaux, vont de relations temporaires ou facultatives à des coopérations indispensables à la survie d'une espèce, les liens peuvent être réciproquement bénéfiques aux partenaires ou n'être profitables que pour un seul. Voici un petit topo sur ces comportements fascinants à observer.

Généralités

Les relations symbiotiques présentent nécessairement des avantages pour la survie des espèces ayant développées ce comportement, on peut citer :

Ces relations sont cataloguées en fonctions des divers aspects d'union entre espèces.

Union indispensables et durables entre espèces
Relations non vitales entre espèces
Dans l'aquarium

Il ne fait aucun doute qu'observer un comportement symbiotique est captivant. D'autre part une symbiose réussie facilite la maintenance de ces symbiotes en leur offrant un environnement naturel sécurisant. Tenter de reproduire une symbiose est donc une excellente idée. Mais faut-il impérativement réunir des symbiotes, est-ce indispensable ?

Les associations physiologiques : Les zooxanthellés

Dans le cas de mutualisme ou de symbiose véritable, comme celles des organismes associés aux algues zooxanthelles, oui, assurément. Il s'agit d'associations physiologiques et il est vital de réunir et d'assurer la survie des deux symbiotes. Ainsi les invertébrés que l'on nomme communément symbiotiques dans nos aquariums hébergent des algues dinoflagellés, les zooxanthelles, dans leurs tissus et cette symbiose est indispensable à leur métabolisme. L'association entre autotrophes et hétérotrophes, bien qu'invisible à nos yeux, est par ailleurs assez remarquable, elle apparait rapidement dans l'évolution des espèces, avec les métazoaires, et a permis la constitution des récifs. C'est l'origine d'un biotope excessivement riche malgré un milieu naturel dépourvu de nutriments.

Il faut reconnaitre que cette association est aussi une chance pour l'aquariophile car une excellente source de lumière suffit pour répondre aux besoins trophiques de ces animaux en captivité. Ainsi l'éclairage joue un rôle fondamental dans la croissance, nourriture et calcification, des coraux et animaux symbiotiques des algues zooxanthelles.

Voici une liste non exhaustive d'invertébrés symbiotiques d'algues unicellulaires aptes à être conservés en aquarium. Attention, certaines espèces parmi ces familles sont dépourvues de zooxanthelles (elles sont aussi appelées non-symbiotiques) et doivent recevoir des apports nutritionnels de phyto et zoo plancton, par exemple Tubastrea spp, Dendronephthya spp, etc.

Autres comportements hétérospécifiques en aquarium

Malgré tout nos soins, l'aquarium modifie d'une manière assez radicale l'environnement naturel. La réduction de la biodiversité est dratisque, l'espace limité. Les prédateurs sont définitivement absents ou bien, au contraire, perpétuellement présents. Dans cette dernière hypothèse, il peut s'agit d'une erreur dans le plan de population ou d'un défaut de maintenance, par exemple la présence involontaire d'une crevette mante (Odontodactylus scyllarus).
D'autre part le tarissement des nourritures naturelles, remplacées par les distributions d'aliments préparés, changent les habitudes alimentaires.
Dans ces circonstances les relations de carpose sont moins vitales, bien que très probablement, leur accomplissement soit une source d'évacuation du stress, de bien-être et de longévité pour le(s) symbiote(s).

Quelques exemples :

Les nettoyeurs

Les crevettes barbier (Lysmata amboinensis, Lysmata debelius, Stenopus hispidus), les labres (Labroides dimidiatus), les gobies (Gobiasoma oceanops), etc. se nourrissent exclusivement des parasites portés par les poissons, ces derniers bénéficient en retour d'une remise en forme. En milieu naturel cela est du mutualisme. En aquarium il est exceptionnel que cela soit le cas, les parasites étant rapidement éradiqués. Aussi le comportement naturel va t-il être modifié jusqu'à faire accepter des nourritures de substitution aux 'nettoyeurs' qui perdront peu à peu ce rôle. Mais cela n'empêche pas de conserver ces animaux, toujours excessivement sociables (bonnes relations inter spécifiques) et généralement fort bien acceptés par les autres pensionnaires de l'aquarium.

Anémone, une protection convoitée

Le pouvoir urticant des anémones est paradoxalement recherché par bon nombre d'espèces ; crabes porcelaines (Neopetrolisthes maculatus), pagures, gobies, crevettes (Thor amboinensis, Periclemenes brevicarpalis) et, bien entendu, poissons clowns (Amphiprion spp), ces derniers appréciant particulièrement Heteractis spp et Entacmea quadricolor. Dans un aquarium dépourvu de prédateur cette relation perd son caractère vital. A l'inverse, la présence perpétuelle d'un prédateur peut forcer un animal, locataire inhabituel dans cette relation, à rechercher la protection assurée par une anémone (Stenopus hispidus par exemple).

Il faut peser avantages et inconvénients à placer une anémone dans l'aquarium, présence déconseillé au débutant car de maintenance difficile. Une anémone est aussi un animal souvent de grande taille, capable de se déplacer. Il est donc peu compatible avec les invertébrés sessiles et un petit aquarium. Aussi sans conditions très favorables pour sa maintenance, il vaut mieux s'en priver. Il est assez difficile de quantifier l'effet provoqué par le manque de cette relation pour le symbiote et il faut trouver un palliatif à son absence. Un hôte de substitution doit être proposé, comme un corail mou ou un LPS qui peut être accepté à défaut de mieux. Cependant cet hôte pourra aussi être importuné et il faut en conséquence prévoir d'en mettre en nombre et de tailles suffisantes. Les meilleurs choix sont les LPS, les Sarcophyton spp, Sinularia spp, Pachyclavularia spp, Rhodactis spp, Ricordea spp. S'il n'est donc pas impossible de maintenir dans d'assez bonnes conditions un couple d' Amphiprion sp. ou un groupe de Thor amboinensis en absence d'anémone, l'idéal est de bâtir l'aquarium autour de cette symbiose et des besoins très spécifiques de l'anémone. CF nanoZine : Clowns et anémones


Thor amboinensis, Phymantus sp
Thor amboinensis en toute quiétude dans un Phymantus sp.

Phymantus spp est une anémone de petite taille, robuste et facile à nourrir à condition de lui trouver un emplacement protégé d'un éclairement trop puissant. Une place dans un fond sableux à proximité d'une roche convient assez bien. Les partenaires sont de petite taille et conviennent bien aux nano-récifs. Malheureusement posséder ce type d'anémone est un coup de chance car elle est peu importée.

Les crevettes sont expertes dans les relations de parécies, en particulier les Periclemenes sp. que l'on rencontre associées à des anémones, des échinodermes, des nudibranches, ... En milieu naturel leur remarquable mimétisme fait qu'elles passent généralement inaperçues. L' inquilisme est le nom donné à cette relation de camouflage d'un partenaire par un autre.

Les très petites anémones utilisées comme armes défensives par les crabes (Lybia tesselat ) ou les pagures (Dardanus spp) sont bien difficiles à conserver en aquarium alors que ces associations sont excessivement attractives. Il faut prévoir une maintenance difficile et des soins attentifs constants. Les anémones doivent être nourries régulièrement faute de quoi elles dépérissent. L'aquariophile attentionné est récompensé par le spectacle incroyable du crabe 'pom pom girl' Lybia tesselata. Cette maintenance est moins problématique avec les crabes porcelaines Neopetrolisthes maculatus ou crevettes Periclemenes spp symbiotiques d'anémones plus robustes (Cryptodendrum sp. pour ces dernières).

Les scléractiniaires autre abri recherché

Les coraux branchus fournissent un dédale où les petites espèces peuvent trouver refuge. Ce peut être des poissons vivants en frange des massifs coralliens comme les Chromis sp, se réfugiant à la moindre alerte dans les buissons d'Acropora spp ou pendant le repos nocturne. Ce peut être aussi des occupants permanents comme les poissons Bryaninops spp, Gobiodon spp ou encore des crabes trapèzes (Trapezia spp, Tetralia spp) toujours associés à des coraux branchus. Ces relations sont véritablement symbiotiques car si le corail fourni une excellente protection, il bénéficie en retour d'un entretien contre les algues, de l'élimination des parasites, de ses tissus nécrosés et d'apports de déjections organiques. Ce dernier point est utile dans ces eaux pauvres en nutriments pour fournir les composants organiques nécessaire à la croissance des algues zooxanthelles symbiotiques.
Les coraux massifs, comme Porites spp permettent à d'autres espèces de s'enchâsser dans la structure corallienne et d'être ainsi définitivement à l'abri de prédateurs. Cette technique est utilisée notamment par les vers polychètes (Spirobranchus giganteus), les mollusques (Tridacna spp), les crustacés bernard l'ermite (Paguritta spp). Le bénéfice n'est toutefois pas réciproque.

Un couple étonnant

Les relations entre poissons gobies fouisseurs, (notamment Amblyeleotris spp, Cryptocentrus spp, Paragiobodon spp, Ctenogobiops spp, Stonogobiops spp), et crevettes pistolets (Apheus sp.) sont d'un intérêt particulier pour peupler les micro-récifs. Cette symbiose est assez remarquable et captivante : La crevette est chargé de creuser un terrier dans le substrat. La survie de celle-ci, dépourvue d'organes sensoriels performants, dépend de la surveillance des abords effectuée par le poisson gobie. En retour celui-ci dispose d'un terrier parfaitement entretenu. Si cette symbiose est vitale pour la crevette dans le milieu naturel, ce l'est moins dans l'aquarium. Cependant elle ne présente pas de difficulté à être réalisée même dans un aquarium de dimension modeste pourvu d'un substrat épais. Aussi la meilleure solution lorsque l'on achète un gobie symbiotique est de rechercher également son compagnon Alpheus sp. ou mieux d'acheter une paire déjà formé.

Conclusion

Bien d'autres formes d'associations hétérospécifiques peuvent être réalisées en aquarium, par exemple les juvéniles de Pterapogon kauderni et les oursins diadèmes, etc. Et très sûrement beaucoup échappent à notre curiosité. Cela renforce notre conviction de voir chaque animal non pas comme un élément isolé de l'aquarium récifal mais comme faisant partie d'un microcosme, riche, complet, équilibré*, surprenant malgré sa très petite taille au regard du milieu naturel et cela pour notre émerveillement d'aquariophile.

* NDR : Désolé, cela sonne comme une publicité pour un petit-déjeuner...

Thor amboinensis

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